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Patient de 45 ans avec Troponine à 4 fois la norme (80)

INTRODUCTION

À l’ère du COVID-19, nous lançons Radio Cochin, des séquences courtes et des messages clairs sur le coronavirus pour nos collègues de ville. 

Je suis Docteur Vincent Mallet, médecin à Cochin, Professeur des Universités de Paris et je m’entretiens avec le Professeur Denis Duboc, Chef du Service de Cardiologie à Cochin.

Retour d'expérience

Présentation du cas clinique

DR MALLET : Je suis médecin généraliste à Ernée dans la Mayenne et j’écoute Radio Cochin.

Je vois un homme de 45 ans qui a fait un syndrome respiratoire il y a 10 jours. Il garde de la fièvre à 38-39, et est extrêmement fatigué. Je pense que ce monsieur a fait une infection au COVID car il y a eu des cas similaires dans son entourage.

Je ne comprenais pas pourquoi il était encore inflammatoire et si fatigué donc je lui ai fait une prise de sang et j’ai dosé la Troponine qui revient à 80, 4 fois la norme.

Il n’a aucun symptôme ou douleurs thoraciques mais il a des facteurs de risque car il est fumeur. Dans ce cas, que dois-je penser de 4 fois la normale de Troponine ?

Réponse et discussion

PR DENIS DUBOC : C’est un problème qui pose la question plus générale de l’intérêt de la Troponine dans l’infection par le COVID. Nous savons maintenant que la Troponine s’élève dans les infections sévères à COVID et que ce serait d’ailleurs un signe de gravité d’après les séries d’épidémiologie. 

Il s’agit probablement d’une contusion myocardique, ce que les Anglo-saxons appellent « myocardial injury » liée à une hypoxie profonde prolongée. Ce sont donc des formes sévères qui élèvent la Troponine. 

Dans le cas particulier de ce patient nous pouvons poser la question de la myocardite car il y en a en ce moment. Ce sont parfois des myocardites très sévères voire fulminantes dans quelques cas rapportés. Mais dans ce cas, ce sont des patients qui vont très mal et qui ont des signes majeurs d’insuffisance cardiaque.

Dans le cas comme celui-ci d’une élévation modérée faite à titre systématique de la Troponine, il n’y a rien de spécifique à faire. Sauf éventuellement un électrocardiogramme, pour être sûr qu’il n’y ait pas une ischémie cliniquement silencieuse qui paraîtrait électriquement.

Et quand le calme sera revenu, je dirais d’envisager de faire un bilan étiologique pour être certain, sur une IRM, qu’il n’y a pas eu de myocardite qui justifierait d’un traitement préventif pour le long terme.

Et aussi de rechercher une coronaropathie qui se serait éventuellement exprimée de façon indolore, par un coroscanner. Mais sinon, pas d’inquiétude imminente en l’absence de signes cliniques (insuffisances cardiaques évidentes, douleurs thoraciques) ou de modifications électrocardiographiques. 

DR MALLET : Pour vous, ce nombre élevé de Troponine ne doit donc pas forcément être pris en compte. Je n’adresse donc pas mon patient en cardiologie, je ne lui donne pas d’antiagrégant plaquettaires et je reste symptomatique pour sa fièvre.

PR DENIS DUBOC : Si vous voulez être complètement rassurant et que vous connaissez un cardiologue correspondant pas loin, vous le lui adressez pour l’électrocardiogramme et une échographie cardiaque. 

S’il n’y a pas de soucis sur ces deux examens, ce qui est le plus probable dans ce contexte, je conseille de reprendre plus tard, à froid, les examens complémentaires à visée de recherche d’une myocardite ou d’une coronaropathie indolore.

DR MALLET : C’est très clair. Donc si son ECG est normal, je le revois à distance pour faire un bilan, parce qu’il a quand même des facteurs de risques cardiovasculaires. Si j’ai un doute, j’envoie à mon correspondant cardiologue son ECG. Sinon, je ferai un bilan après.

PR DENIS DUBOC : Absolument.

Message de fin

DR MALLET : Votre message pour ce cas clinique ?

PR DENIS DUBOC : Ne pas systématiquement doser la Troponine en cas d’infection par le COVID en dehors de symptômes évoquant une pathologie cardiaque en évolution.

DR MALLET : Merci beaucoup pour ce message très clair et bon courage !

PR DENIS DUBOC : Merci !

Retranscription complète
Il n'y a pas encore de retranscription écrite pour cet épisode

À l’ère du COVID-19, nous lançons Radio Cochin, des séquences courtes et des messages clairs sur le coronavirus pour nos collègues de ville. 

Je suis Docteur Vincent Mallet, médecin à Cochin, Professeur des Universités de Paris et je m’entretiens avec le Professeur Denis Duboc, Chef du Service de Cardiologie à Cochin.

DR MALLET : Je suis médecin généraliste à Ernée dans la Mayenne et j’écoute Radio Cochin.

Je vois un homme de 45 ans qui a fait un syndrome respiratoire il y a 10 jours. Il garde de la fièvre à 38-39, et est extrêmement fatigué. Je pense que ce monsieur a fait une infection au COVID car il y a eu des cas similaires dans son entourage.

Je ne comprenais pas pourquoi il était encore inflammatoire et si fatigué donc je lui ai fait une prise de sang et j’ai dosé la Troponine qui revient à 80, 4 fois la norme.

Il n’a aucun symptôme ou douleurs thoraciques mais il a des facteurs de risque car il est fumeur. Dans ce cas, que dois-je penser de 4 fois la normale de Troponine ?

PR DENIS DUBOC : C’est un problème qui pose la question plus générale de l’intérêt de la Troponine dans l’infection par le COVID. Nous savons maintenant que la Troponine s’élève dans les infections sévères à COVID et que ce serait d’ailleurs un signe de gravité d’après les séries d’épidémiologie. 

Il s’agit probablement d’une contusion myocardique, ce que les Anglo-saxons appellent « myocardial injury » liée à une hypoxie profonde prolongée. Ce sont donc des formes sévères qui élèvent la Troponine. 

Dans le cas particulier de ce patient nous pouvons poser la question de la myocardite car il y en a en ce moment. Ce sont parfois des myocardites très sévères voire fulminantes dans quelques cas rapportés. Mais dans ce cas, ce sont des patients qui vont très mal et qui ont des signes majeurs d’insuffisance cardiaque.

Dans le cas comme celui-ci d’une élévation modérée faite à titre systématique de la Troponine, il n’y a rien de spécifique à faire. Sauf éventuellement un électrocardiogramme, pour être sûr qu’il n’y ait pas une ischémie cliniquement silencieuse qui paraîtrait électriquement.

Et quand le calme sera revenu, je dirais d’envisager de faire un bilan étiologique pour être certain, sur une IRM, qu’il n’y a pas eu de myocardite qui justifierait d’un traitement préventif pour le long terme.

Et aussi de rechercher une coronaropathie qui se serait éventuellement exprimée de façon indolore, par un coroscanner. Mais sinon, pas d’inquiétude imminente en l’absence de signes cliniques (insuffisances cardiaques évidentes, douleurs thoraciques) ou de modifications électrocardiographiques. 

DR MALLET : Pour vous, ce nombre élevé de Troponine ne doit donc pas forcément être pris en compte. Je n’adresse donc pas mon patient en cardiologie, je ne lui donne pas d’antiagrégant plaquettaires et je reste symptomatique pour sa fièvre.

PR DENIS DUBOC : Si vous voulez être complètement rassurant et que vous connaissez un cardiologue correspondant pas loin, vous le lui adressez pour l’électrocardiogramme et une échographie cardiaque. 

S’il n’y a pas de soucis sur ces deux examens, ce qui est le plus probable dans ce contexte, je conseille de reprendre plus tard, à froid, les examens complémentaires à visée de recherche d’une myocardite ou d’une coronaropathie indolore.

DR MALLET : C’est très clair. Donc si son ECG est normal, je le revois à distance pour faire un bilan, parce qu’il a quand même des facteurs de risques cardiovasculaires. Si j’ai un doute, j’envoie à mon correspondant cardiologue son ECG. Sinon, je ferai un bilan après.

PR DENIS DUBOC : Absolument.

DR MALLET : Votre message pour ce cas clinique ?

PR DENIS DUBOC : Ne pas systématiquement doser la Troponine en cas d’infection par le COVID en dehors de symptômes évoquant une pathologie cardiaque en évolution.

DR MALLET : Merci beaucoup pour ce message très clair et bon courage !

PR DENIS DUBOC : Merci !

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